Il y a des années, le culte élémentaire d'une démone régnait depuis un temple près de Nulb, jusqu'à ce que le Cercle des Huit le rase.
Retour en 2003 ... ou presque.
Préparez-vous à un véritable retour dans le passé ! The Temple of Elemental Evil est un de ces RPG « old-school » qui, même aujourd'hui, parvient à nous faire sourire comme une bande de vétérans autour d'une table de Donjons et Dragons… avant de nous faire grincer des dents devant un bug ou un choix de conception datant de 2003. C'est une adaptation vidéoludique ambitieuse et étonnamment fidèle des règles de Dungeons & Dragons 3.5, se déroulant dans le monde de Greyhawk , avec un système de combat au tour par tour parmi les plus « classiques » jamais vus sur PC. L'aventure de Temple of Elemental Evil nous transporte sur les terres de Flanaess, où le mal lié au culte de l'élémentalisme revient rôder autour d'un temple qui, par le passé, fut le théâtre de guerres et d'horreurs. Le cadre est volontairement classique : nous arrivons dans la région, sommes confrontés à des rumeurs, des soupçons et des problèmes de plus en plus concrets, et peu à peu, une mosaïque de factions, d'intérêts et de menaces se déploie devant nous, convergeant vers un point unique : le complexe souterrain qui donne son nom au jeu. C'est une intrigue « modulaire », au sens le plus noble du terme : elle nous offre un contexte solide et nous laisse la liberté de l'enrichir de notre propre style de jeu, de nos compagnons et de notre propre morale. Le récit ne recherche pas le spectaculaire moderne, préférant une construction progressive : de petites tâches, des explorations révélant de nouvelles connexions et un sentiment de danger grandissant à mesure que l’on comprend qu’il ne s’agit pas simplement de nettoyer un repaire de bandits. De ce fait, le jeu parvient souvent à transmettre cette impression d’une « campagne qui prend forme » : ce qui semble au départ un problème local devient un nœud dans un réseau plus vaste, et le temple cesse d’être un donjon pour devenir un organisme vivant, avec ses hiérarchies, ses rituels et ses intérêts qui s’entremêlent. Cela dit, il faut le dire : le rythme narratif n’est pas toujours limpide, et certaines transitions peuvent paraître plus « mécaniques » que captivantes, surtout si l’on s’attend à une écriture à la Planescape ou à une épopée comme Baldur’s Gate 2. Ici, l’accent est mis sur le respect de l’aventure et des règles, et non sur le style ou la direction narrative. Par moments, on a l’impression que l’histoire n’est qu’un prétexte pour descendre dans le temple. Quant à la langue, malheureusement Temple of Elemental Evil n'est pas localisé en français.
Pour le dire franchement, c'est le gameplay qui explique la ferveur quasi militante dont The Temple of Elemental Evil se souvient : c'est un CRPG isométrique au tour par tour basé sur les règles de D&D 3.5, et cette fidélité se ressent dans chaque choix de combat et dans la composition de l'équipe. La gestion du groupe est primordiale : il ne s'agit pas d'un « héros et de personnages secondaires », mais d'un véritable groupe, avec des rôles qui doivent être bien pensés et cohérents, car la difficulté et la nature des rencontres ne laissent aucune place à l'improvisation. En pratique : la victoire se gagne d'abord sur la fiche de personnage, puis sur la grille de combat, et le jeu tient parfaitement sa promesse. Les combats prennent toute leur dimension lorsqu'on adopte une approche tactique : lignes de tir, attaques d'opportunité, sorts de contrôle, gestion des actions, positionnement et utilisation intelligente de l'environnement. C'est un de ces jeux où un guerrier « bien conçu » est un atout précieux, mais où un clerc et un magicien joués avec soin peuvent renverser le cours d'une bataille qui semblait perdue, tout comme sur une table de jeu de rôle. C'est aussi un de ces jeux où un repos, une préparation ou une séquence de buffs ratés peuvent transformer un affrontement « gagnable » en un véritable calvaire. Le revers de la médaille, cependant, est toujours présent : la gestion des déplacements et les interactions ne sont pas toujours à la hauteur des attentes, et la version « vanille » souffre d'une réputation d'instabilité et de problèmes techniques qui ont historiquement marqué l'image du jeu. En résumé, même lorsque tout fonctionne, une certaine rigidité découle du choix de suivre les règles à la lettre : fascinant pour les inconditionnels de D&D 3.5, mais difficile à appréhender pour ceux qui recherchent une expérience plus moderne ou plus souple.
Une technique vintage.
Côté direction artistique , The Temple of Elemental Evil privilégie une fantasy classique et accessible, avec des décors qui évoquent l'atmosphère du module et du monde de Greyhawk plutôt que d'éblouir par une esthétique exotique. Villages, campagnes, ruines et donjons forment un ensemble cohérent, et la vue isométrique facilite l'organisation tactique, transformant chaque pièce en un petit théâtre d'opérations. Ce n'est pas un jeu qui impressionne par son effet « wahou » actuel, mais son identité visuelle épurée et fonctionnelle est rassurante pour ceux qui recherchent le charme des CRPG à l'ancienne. Sur le plan technique, son charme vintage et ses limitations se font sentir : il s'agit d'un titre de 2003, conçu pour Windows et pour une époque aux configurations très différentes d'aujourd'hui, avec toutes les complications que cela implique. Au fil des ans, la communauté a développé des outils et des mods pour améliorer les performances, l'interface et corriger divers problèmes. Sur PC, on trouve des références à des packages visant à corriger les bugs, à assurer la conformité aux règles et à restaurer le contenu. En d'autres termes, le jeu bénéficie d'une seconde jeunesse grâce à ceux qui ont travaillé dessus après sa sortie, ce qui en dit long sur la solidité de ses fondations et les failles présentes au lancement. Ce nouveau lancement, de fait, ramène également les problèmes de la version classique. L' audio accompagne parfaitement l'aventure : effets sonores, ambiance et musique contribuent efficacement à l'exploration et aux combats, même si l'ensemble reste plus fonctionnel que mémorable au sens d'une « bande originale de concert ». Les options audio sont classées par catégorie (effets, dialogues, musique, etc.), ce qui permet d'affiner l'expérience, notamment lors de l'alternance entre exploration et longs combats. Globalement, c'est un élément qui a bien vieilli et qui contribue à cette ambiance de partie de Donjons et Dragons où la tension monte crescendo.

VERDICT
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Lorsqu'il fonctionne, le système de tactiques au tour par tour de The Temple of Elemental Evil et sa fidélité aux règles de D&D 3.5 offrent des combats intenses, réfléchis et souvent mémorables, avec des victoires qui donnent véritablement l'impression d'une « partie bien jouée » plutôt que d'une simple accumulation de chiffres. Ce niveau d'ambition a un prix : une expérience qui exige de la patience, tolère peu l'improvisation et présente quelques imperfections techniques qui, surtout aujourd'hui, peuvent diviser les joueurs entre ceux qui succombent à sa rigueur et ceux qui abandonnent par épuisement.