"Combien de fois les ai-je écrites... dans combien de cauchemars me sont-elles apparues ! Un... sept... quatre... Vous savez les enfants, quand j'avais votre âge j'aimais beaucoup les chiffres. Cinq… un… et enfin, sept. ... mais je ne pouvais pas imaginer que j'en aurais porté six sur mon bras toute ma vie". Un vieil homme écrit des chiffres sur un tableau noir, des chiffres qu'il révélera plus tard sont également gravés sur son bras. Semblable à un simple tatouage pour les yeux des enfants, mais en vérité, un avertissement douloureux et un rappel d'un passé qui ne peut être oublié et auquel il ne faut jamais revenir. Une expérience terrible, humiliante, désespérée dans les camps de concentration d'Auschwitz et de Monowitz. Cet homme est Primo Levi. Ainsi commence ce roman graphique conçu par Matteo Mastragostino avec des dessins d' Alessandro Ranghiasci qui imagine l'auteur de « Si c'est un homme » et d'autres œuvres importantes, dans une école. Celle qu'il fréquentait enfant, pour parler de son expérience dans les camps de concentration. L'idée de cet ouvrage vient d'une question de l'auteur : qu'aurait pu dire Levi à un enfant ? Et les réponses, comme il l'exprime aussi à la fin du volume, Mastragostino les a trouvées dans les livres de Levi, dans ses interviews et dans ses déclarations, mais il a aussi tout intégré à travers ce que les autres ont dit ou écrit sur lui. Et c'est ainsi que Primo Levi revient - dans cette bande dessinée publiée par Steinkis - dans son jardin d'enfants, pour pouvoir parler aux enfants. Des êtres insouciants et heureux, qui n'ont jamais eu à affronter une guerre, la terreur des bombes, la peur. Même des enfants un peu effrontés qui comparent le camp de concentration à l'école, sans comprendre que l'école sert à rendre les gens libres !
 
Dans ces pages, désormais en couleurs, on lui raconte aussi sa participation à la résistance du Val d'Aoste, de sa précieuse amie Vanda Maestro, d'un événement terrible qui pèsera à jamais dans le cœur de Levi - le meurtre de deux jeunes des hommes d'une partie des camarades de la résistance - le dénoncement qui conduira à la capture de leur petit groupe, pour ensuite être transféré au camp de transit de Fossoli et finalement déporté à Auschwitz. Levi révèle aux garçons que sa survie a également été possible grâce à divers coups de chance : grâce à son diplôme en chimie, il a pu travailler dans un laboratoire, un homme - pas en prison - l'a aidé à plus d'une occasion, et aussi souligne l'importance de la connaissance des langues - en particulier l'allemand - qui était l'une des raisons de la vie ou de la mort dans le camp de concentration. En fait, dans les tableaux, il convient de noter l'utilisation de différentes langues : de la langue allemande au dialecte piémontais. La tentative est de faire comprendre encore plus au lecteur à quel point peuvent se sentir perdus tous ceux qui ne connaissent pas la langue. Les dessins sont tous avec des lignes raffinées et précises, Ranghiasci parvient à frapper, comme pour révéler l'âme des différents personnages. Il y a des dessins très durs qui montrent le désespoir des prisonniers des camps de concentration, les corps de plus en plus maigres et squelettiques, les larmes, les yeux ahuris et remplis d'horreur. L'incrédulité puis la résignation à comprendre que nous ne sommes plus des personnes, mais des nombres. De plus, ils perdent progressivement leur âme également. Le but premier de tout reclus devient de vivre un jour de plus, de survivre, quitte à envoyer ses frères mourir. Parmi les monstruosités des tableaux faisant référence à cette terrible histoire, à ce fait historique qu'il ne faut jamais oublier, il y a aussi un beau geste des enfants, dans l'un des graphismes les plus émouvants. Presque une expression de la façon dont un acte de bonté peut vraiment aider les gens. En conclusion, en plus d'une explication de l'auteur sur son œuvre, on peut également trouver la chronologie de la vie de Primo Levi, une liste - complète avec biographie - des personnages cités, et une liste de sites et livres à visiter apprendre encore plus.