Crépuscule Velvet
Plate-forme : Bande Dessinée
Date de sortie : 04 Mars 2020
Résumé | Test Complet | Images | Actualité
Editeur :
Développeur :
Genre :
Bande dessinée
Multijoueur :
Non
Jouable via Internet :
Non
Test par

Nic007


8/10

Scénario et dessin : Vitt Moretta

Todd, Colby et Liam, les jeunes protagonistes de cette histoire, partent dans un bois à la recherche du célèbre club Sea Breeze. En effet, ils ont remporté un concours dont le prix consiste en quelques jours de plaisir (alcoolique et sexuel), à dépenser à l'intérieur de la structure, loin de la société qui les étouffe tant. «Savez-vous ce qui serait cool? N'ayez pas le sens des proportions », explique Colby au début de l'histoire, une pensée qui fera bouger les cordes du récit et aura la valeur d'un présage à l'approche de l'épilogue. De là, les aventures racontées dans "Crépuscule Velvet" (Il tramonto del Sea Breze, publié en Italie par Coconino Press ; un début comique qui se nourrit de synthèse, d'hormones galopantes et d'un romantisme insensé post-adolescent qui ne fait jamais de mal.

Le Sea Breeze est un lieu consacré à la perdition, une destination de pèlerinage, une destination de vacances de rêve, une dimension sociale dans laquelle chacun jouit des mêmes droits et d'un seul devoir: s'amuser au point d'épuisement dans l'impudeur régnante qui anime les fêtes infinies de la local. Le séjour des trois amis se poursuit alors entre des combats étriqués, des rencontres intéressantes avec des personnages étranges et des rivières d'alcool. L'un d'entre eux se fait battre et rencontre un clochard qui tente de se suicider mais préfère ensuite faire la fête. L'autre connaît un cocaïnomane fou qui veut être son père. Le dernier se perd dans les bois avec son actrice préférée ; elle panique en mode new age. Puis il y a une troupe de scouts, une colonie de mouettes disparue, un mystère du passé et enfin un grand désordre. Et pour garder tous ces faits sous contrôle, les personnages n'ont qu'à rester en mouvement, à se mettre à genoux, à sauter, à rouler et à danser. Comme dans un film muet avec de la musique punk au lieu du piano.

Il n'y a pas de douleur, pas de chagrin dans cet ouvrage, juste des nerfs qui réagissent au stress grotesque et exagéré de Vitt Moretta. Et en fait, la première chose qui attire l'attention est le jeu d'acteur surhumain des personnages, débordant d'une énergie caricaturale qui les transforme souvent en pur mouvement, comme les enfants hyperglycémiques qui courent et se secouent jusqu'à ce que l'effet excitant du sucre prenne fin. C'est une fureur toute physique qui nous rappelle Gus de Christophe Blain dans sa capacité de synthèse et ses excès, mais qui, lorsqu'elle est lancée sur un groupe d'adolescents, acquiert de nouvelles notes nerveuses et maladroites. C'est une comédie burlesque pour adolescents où l'obstacle n'est pas, comme dans la plus classique des comédies, les choses qui se situent entre l'objectif et le corps, mais le corps lui-même. Vitt Moretta raconte ensuite l'ingouvernabilité de la chair et des muscles, décrivant les entraves et les excès physiques de l'adolescence, mais aussi son enthousiasme physique débordant et la force qui innerve les corps.

Tout cela se traduit par un sur-activité inévitable où chaque mouvement et chaque phrase sont portés à leur extrême. Velvet s'y révèle être le personnage clé de la poétique du livre. Actrice en proie à une crise spirituelle et hormonale, Velvet semblerait au départ être une caricature classique de l'actrice folle et riche mais, tout en restant cohérente avec sa propre folie, elle acquiert de la profondeur et de l'humanité tout au long de l'histoire. Velvet est l'union diabolique entre Britney Spears du début du millénaire et Dorothy Vallens de Blue Velvet : un cheval fou indomptable, avec une force physique érotique et effrayante, un monstre dont il est impossible de ne pas tomber amoureux. Parmi les plis de la folie du personnage, Moretta semble cacher un mystère, les tessons de quelque chose qui s'est brisé à jamais et que Velvet a caché sous le tapis fait d'égoïsme, de New Age, de folie et d'un héroïsme inégal. Mais Crépuscule Velvet est aussi l'histoire d'une fête que Moretta raconte comme un "Où est Charlie ?" très détendu dans lequel personne ne se soucie de chercher le personnage caché et la recherche de quelque chose cesse d'être importante : seule l'expérience compte. Le lecteur doit chérir cette approche pour ne pas perdre de temps à chercher un sens et un thème explicités dans la bande dessinée.

VERDICT

-

Dans Crépuscule Velvet, Moretta raconte les entraves et les excès de l'adolescence presque exclusivement à travers la physicalité et les mouvements de ses protagonistes. D'autre part, pourquoi avilir l'ouvrage en le réduisant au minimum d'une simple histoire de formation ? La bande dessinée est une grande fête désordonnée où il se passe beaucoup de choses et où, par erreur, on grandit même un peu. Peut-être. Et en fait, dans la fin très calme et apparemment sous-entendue par rapport au feu d'artifice de quelques pages auparavant, les personnages montent dans la voiture avec le visage de quelqu'un qui n'a rien compris et qui a le sentiment de n'avoir rien appris. Comme il se doit. Jusqu'à la prochaine fête, jusqu'à la prochain lever de soleil.

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